1000 Degrees

Episode

4

Plot twist

"Why would you break a 15-year-old teenager?"

For almost a year, French journalists Adèle Humbert and Emilie Denètre investigated a cold case. "1000 Degrees" is the first true crime podcast series in France.



Duration : 
20
min.
16.11.2020
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La bascule

La batterie, pièce maîtresse de l’accusation contre Daniel Massé

Dans l’épisode 4, les enquêteurs mettent la main sur deux batteries lors d’une perquisition chez Daniel Massé. Elles sont identiques à celle utilisée dans le colis piégé. Daniel Massé affirme qu’il a récupéré ces batteries à la Soterem, son ancienne entreprise. Il les utilisait pour faire fonctionner ses lampes de plongée. Sur leurs coques en plastique le nombre « 190598 » a été gravé par le constructeur. On retrouve la même inscription sur la batterie du colis piégé. En revanche, le numéro de série est différent, à un chiffre près.

      La batterie du colis piégé :
Le 16 décembre 1994, dans les débris qui jonchent le sol de l’entreprise Medilens après l’explosion, les enquêteurs découvrent, tout près de la porte d’entrée, un « bloc » noir, de la taille d’une petite brique. Il s’agit d’une batterie 12 volts. Du bois aggloméré est encore collé sur l’une de ses faces.  Les enquêteurs viennent de récupérer la pièce maîtresse du colis. Elle est placée sous scellé avec le numéro « 32 ». L’expert Claude Galey, chargé de son analyse, remarque sur la face antérieure des résidus d’étiquette, mais il ne peut pas donner la marque car « la partie imprimée » a été totalement détruite par l’explosion. Il note également la présence de « rayures légères » sur la coque. L’auteur de l’attentat a tenté d’effacer quelque chose à cet endroit précis. Grâce à une lumière bleue rasante, l’expert parvient néanmoins à reconstituer l’inscription. C’est une série de chiffres « 190998 » avec un « 9 » descendant. Claude Galey pense que cette inscription pourrait être une date de péremption, celle de l’électrolyse.
En démontant la batterie, il découvre une autre série de chiffres, « dont la signification est inconnue » : « 8942 7 »

      Les batteries des lampes de plongée de Daniel Massé :
Lors de l’un de ses interrogatoires par les policiers, Daniel Massé leur révèle qu’il possède effectivement des batteries 12 volts du même type que celle retrouvée dans le colis piégé. Il indique même qu’elles se trouvent sur la cheminée, à l’intérieur de lampes de plongée qu’il a fabriquées. Il y a en deux. Une pour lui, la seconde pour Yannick, son fils.
Les policiers étaient jusqu’ici passés à côté ! À l’issue d’une nouvelle perquisition, elles sont saisies et font l’objet des scellés 37 et 38. Elles seront analysées par l’expert Galey en même temps que la batterie du colis piégé. Les batteries de Daniel Massé portent une étiquette sur la face antérieure. On apprend ainsi qu’elles sont de marque FULMEN, et que le début de garantie était septembre 1989, soit « 9 » et « 89 ». Les batteries Massé possèdent également une inscription sur la coque en plastique : 190598. La même série de chiffres que celle du colis piégé. Le « 9 » est là aussi descendant. À l’intérieur, on retrouve aussi un numéro (identique pour les deux batteries de Daniel Massé) qui diffère à un chiffre près de celle du colis piégé, il s’agit du « 89407 ».

          L’enquête au Japon :
Les enquêteurs remontent la piste des batteries. Elle ont été fabriquées au Japon par la compagnie « Shin Kobe » avant d’être importées en France par l’entreprise francilienne CEAC de Gennevilliers. Dans l’hexagone, elles sont ensuite distribuées sous deux marques différentes : FULMEN ou HITACHI. C’est l’étiquette – qui était calcinée sur celle du colis piégé – qui permet de les distinguer.
Juste après la remise du rapport de l’expert Galey en juin 1995, le juge Fernandez lance une commission rogatoire internationale. Il voudrait en savoir plus sur ces batteries et notamment le nombre de batteries exportées en France mais aussi la signification des numéros retrouvés à l’intérieur et sur la coque en plastique.
Le 20 mars 1998, presque trois ans après la demande, la réponse arrive enfin par l’entremise d’Interpol. Elle est très courte, environ 10 lignes, et c’est très évasif. On apprend ainsi qu’un certain M. Akaï, employé des services généraux de « Shin Kobe Electric Machinery LTD » a été interrogé. Il explique que de septembre 1988 à juin 1994, 290 000 batteries ont été expédiées vers la CEAC de Gennevilliers. M. Akaï assure également que Shin Kobe n’inscrit rien sur la coque, il ne dit rien en revanche sur le numéro intérieur.
En réalité, à la fin des années 80 - début 90 : la société Shin Kobe a changé sa procédure d’exportation et a effectivement arrêté de graver un numéro sur la coque. Soit M. Akaï n’est pas au courant de ce changement, soit il n’a pas été interrogé de manière suffisamment précise sur ce point. Finalement, après une très longue attente, cet interrogatoire ne permet pas d’éclairer réellement les enquêteurs : on ne sait toujours pas à quel point les numéros extérieur et intérieur des batteries Shin Kobe sont discriminants.

         L’enquête en France :
En France, Daniel Massé est interrogé sur la provenance de ses batteries. Il explique qu’il les a récupérées via la Soterem, son ancienne entreprise. En 1990, la société a en effet acquis 260 batteries auprès de la CEAC pour monter des système de sécurité pour ascenseurs. Le marché n’ayant finalement pas abouti, la Soterem a donc déménagé, en 1991-1992 ce stock devenu inutile et encombrant à Montgiscard dans une annexe prêtée par Michel Deleris, un ancien employé. Le patron de la Soterem, M. Gaetcher, assure  néanmoins que quelques exemplaires ont été gardés au siège de la Soterem, à Castanet-Tolosan, pour « des montages provisoires ».
Daniel Massé est en très bons termes avec Michel Deleris. C’est son ancien chef à la Soterem, et il lui rend souvent visite à Montgiscard, au siège de sa nouvelle entreprise. Au début de l’année 94, alors que Daniel Massé est en train de négocier son départ de la Soterem, il demande l’autorisation de récupérer des batteries, dont la garantie n’était plus assurée, pour équiper ses lampes de plongée. Il obtient cet accord et se rend donc à Montgiscard auprès de M. Deleris qui lui ouvre les portes de la réserve. M. Deleris, que nous avons rencontré, assure que Daniel Massé a pris au maximum 4 batteries, en plusieurs fois.

Interrogé par le juge d’instruction sur ce point précis, Daniel Massé a expliqué :
-       qu’il en avait 2 dans ses lampes de plongée ;
-       et que la 3ème ayant grillé, il l’avait remplacée par une 4ème. Il aurait donné cette dernière batterie à Jean-Christophe Astruc, un ancien collègue de la Soterem qui l’a aidé à fabriquer ses lampes de plongée.
Nous avons pu retrouver Jean-Christophe Astruc, son témoignage est très intéressant. Il nous a déclaré qu’il avait bien aidé Daniel Massé à fabriquer ses lampes de plongée, et qu’ensemble ils avaient discuté de ces batteries inutilisées. En effet, comme Jean-Christophe Astruc pratique la spéléologie, il trouvait l’idée intéressante.
Mais il nous a assuré que Daniel Massé ne lui avait jamais donné une de ses batteries. En revanche, il nous a expliqué qu’il avait lui aussi pris deux batteries dans le stock de la Soterem, situé à Castanet-Tolosan pour faire des lampes de spéléologie. Ces deux batteries ont été placées sous scellé par les enquêteurs mais n’ont jamais été analysées. Dans leur PV, les policiers notent simplement que les deux batteries de Jean-Christophe Astruc portent sur la coque l’inscription « 190598 ». C’est le même numéro qui a été retrouvé sur les batteries de Daniel Massé et sur la batterie du colis piégé.

“Tout le monde s’est servi, il y avait des cageots entiers de batteries à la Soterem"

         Deux questions en suspens :
Ce témoignage de Jean-Christophe Astruc pose donc deux questions :
- Si Jean-Christophe Astruc n’a pas reçu de batterie de la part de Daniel Massé, qu’est devenue la 4ème batterie récupérée par Daniel Massé dans le stock délocalisé de Montgiscard ?
- Si Jean-Christophe Astruc a bien récupéré deux batteries (qui portent le même numéro que celle du colis piégé) dans le stock de la Soterem à Castanet-Tolosan : d’autres employés ont-ils pu faire de même ?

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